Nulle nation à l’horizon sans conciliation des libertés individuelles et appartenances communautaires!

Je parle du Liban évidemment, à la lumière de son histoire contemporaine, mais aussi en retournant aussi loin qu’à ces chers ‘ancêtres’ dits les Cananéens, aussi divisés et à la merci des puissances régionales de l’époque qu’une majeure partie de mes compatriotes.

Nation libanaise? Une chimère! La nation suppose l’unité dans la diversité, une mémoire nationale, une histoire, une identité et une citoyenneté communes, et certainement les libertés individuelles. Elle suppose une gestion socio-politique de cette diversité regroupant deux cadres d’organisation qui se basent sur une conception de l’humain ne pouvant se reconnaître qu’à travers une multiplicité de variantes: le premier doit donner au citoyen – quelles que soient ses appartenances – la possibilité de l’action individuelle directe et faire de lui un partenaire du pouvoir, et il devrait par exemple lui permettre d’adhérer à une législation civile unificatrice du statut personnel. Le deuxième doit permettre aux différentes communautés de sauvegarder l’entente et l’harmonie du tissu social et l’unité du pays et de la société – l’objectif n’étant pas de supprimer par exemple les tribunaux religieux, mais d’ouvrir la possibilité de l’implantation de tribunaux civils.

Il ne s’agit donc pas d’évoquer le danger du confessionnalisme pour prêcher les vertus de l’individualisme, ni les effets néfastes de ce dernier donnant lieu à la survalorisation des identités collectives confessionnelles. Il ne s’agit pas d’opposer le souci de réalisation de soi et de l’humanité à l’engagement religieux; au contraire, les deux sont complémentaires et vont dans un même sens: faire le bien, améliorer sa vie et celle des autres, et libérer les hommes de ce qui les aliène. On combine donc deux principes qui doivent être également protégés: l’autonomie individuelle – et non l’atomisation de l’individu qui se traduit par une absence de mise à distance de soi par rapport aux autres et au monde, voire par une absence d’esprit critique – et la ‘sphère collective’ – religieuse officielle, religieuse non officielle et non religieuse. Ainsi, il ne s’agit pas de privilégier le développement de l’individu privé au détriment du citoyen. Mais sans la liberté individuelle, l’idée de citoyen ne peut être conçue.

L’autonomie exprime à mon avis la possibilité d’avoir le choix d’adopter certaines valeurs plutôt que d’autres, ainsi que la possibilité d’interprétation de ces valeurs et de leur gestion pratique. La citoyenneté implique une co-responsabilité – de la possibilité concrète de l’exercice de la dignité humaine et des droits qui en découlent dans un temps et lieu précis -, mais elle ne signifie pas de légitimer l’exclusion de certaines catégories d’êtres humains. Elle est l’apanage de tout être humain et les critères de son obtention sont conjoncturels. Son aspect conditionnel ne serait pas discriminatoire mais plutôt une interrogation qui s’adresse à tous et chacun, à tous les êtres humains dans la diversité de ce qu’ils sont et dans les multiples composantes de leurs identités.

On peut donc concilier le désir de liberté et d’autonomie de l’individu et son appartenance à une collectivité; d’où l’importance pour des chrétiens et des musulmans au Liban de repenser le statut de l’individu au sein du Christianisme Oriental et de l’Islam et de reconsidérer la théorie d’une fusion totale et définitive dans la communauté. Je réfère ici par exemple à la conception de tafrîd, d’individuation d’Ibn Sina (Avicenne), qui définit l’homme comme être séparé qui a son existence propre dans le temps et dans l’espace, et à la conception de l’identique ou de la mêmeté, huwa-huwa (lui et lui) chez les philosophes comme Ibn Sina, Miskawayh ou Ibn Arabî. Dans le Traité d’éthique de Miskawayh (10e siècle), celui-ci conclut « que l’individu est la réalisation d’une forme universelle qui se singularise dans la matière ». Sur le plan spirituel, l’auteur insiste sur l’identité à partir du redoublement, de l’entrelacement en miroir du huwa. Ibn Arabi fonde la connaissance spirituelle de l’homme séparé, de l’individu. Il faut dire qu’il y a toujours un fondement ontologique du huwa, de l’unicité de l’être. Malgré cette liaison de l’individu à l’être et à Dieu, il y a finalement une pensée de l’humain, une pensée de l’identification et de l’individuation. La mise en jeu de l’individu comme élément de la pensée de l’Islam, à la fois dans la socialité, dans la spiritualité et dans la politique, peut être une base référentielle d’une étude sur la liberté et le rapport de l’homme à la société civile.

Je réfère également aux travaux de l’iranien Aboul Karim Soroush pour lequel la société relève du règne de l’autonomie des décisions humaines, démocratiquement acquises, où l’islamité n’a pas à être imposée aux autres, chacun assumant dans son intériorité sa condition de musulman. Soroush milite pour une version “contractée” de la religion, à l’encontre des tenants du Hezbollah qui en ont une conception “dilatée” (respectivement, ghabze o basté dine). Dans la première représentation du sacré, son domaine est restreint à l’intériorité du musulman alors que pour les partisans du Vélâyaté faghih, il s’étend sur la totalité des relations sociales, cette “dilatation” du religieux étant, pour Soroush, synonyme de sa dilution. En effet, si tout se fait au nom de l’Islam, celui-ci se dissout dans ces actes qui entament aussi sa crédibilité, surtout dans des décisions politiques qui sont, par nature, faillibles. Par contre, la version “contractée” de la religion sépare le sacré des servitudes de la vie sociale et lui donne toute sa spécificité en tant qu’expérience authentiquement religieuse de l’individu.

Dans cette perspective, une relecture du concept d’al-umma s’avère aussi importante, surtout si l’on considère qu’il en existe une diversité d’emplois et de sens. Ainsi, outre la définition dominante qui la qualifie d’un groupe d’hommes et de femmes qui se lient et s’accordent par le choix d’une religion, de l’unité de la foi, et se traduit dans les faits par une unité socio-politique – l’identité islamique est l’axe fondamental autour duquel se constitue le groupe -, une autre ne la lie pas à la religion: par exemple, selon Fârâbi, elle est un « groupement d’hommes dans un territoire déterminé » (Idées des habitants de la cité vertueuse, traduit de l’arabe et annoté par Youssef Karam, Beyrouth-Le Caire, 1980, p.85). Il s’agit donc d’une forme de sécularisation d’al-umma, d’une vision que l’on pourrait qualifier de pragmatique, où l’on s’accorde par exemple sur les critères suivants: intérêt commun, crainte, affinité, contrat, similitude de qualités naturelles, communauté de langue…

La relecture de concepts, de ‘normes’, de traditions et de visions du monde ouvre la voie à la possibilité  de concilier une vision théologique de l’être humain-sujet de Dieu et une vision juridico-politique lui octroyant la responsabilité de ses choix et ses actes. Les Libanais-es auraient donc la possibilité de s’insérer pleinement – ou de choisir le degré d’insertion le cas échéant – dans une communauté et de remettre en cause sa structure normative et institutionnelle, et de jouir des mêmes droits et responsabilités: droit à la différence, c’est-à-dire à s’unir aux autres grâce à ce qui sépare aussi, et droit à l’égalité, c’est-à-dire à s’accepter mutuellement sans être différenciés dans la lutte contre l’injustice. Ils-elles auront la possibilité de construire une nation!

One Morning at the Lebanese University : the Essence of Smiles

Dr Frank DarwicheFestooned with scars, dirty walls, silence and drillers, on the side of the corridor, a happy cockroach that’d died with a smile on his moustache, a hallway, a room, then a hallway then another room… We went, my friend and I, she a professor of religious studies, I a professor of philosophy, festooned with curriculum vitae that were all but dead… we went, we came, we saw, and we were definitely conquered – by the smile of a Lebanese University receptionist/thinker/bureaucrat/humorist… which is all the same in certain administrative dictionaries.
We came to say: “here we are! We wish to work, and there are open positions for next year.”

He looked askance and smiled, in disbelief: “you must be joking, his smile said!” He wondered… no he guessed that we had come from afar – France for me, Canada for her : it must’ve been the white teeth, or maybe the blond hair and high heels, or the smile, the honest one coming from places unknown to the humdrum of Lebanese marshes of confessional appointments, favour currying without the rice – oh does it burn! – and livid underpinnings of institutional infrastructure.

“Your field?” “Philosophy” “Religious studies” – “What?” In Lebanon? Religion? What? This is a confessional country not a religious one – sod the individual!

“Well I can do languages” “Wella… I can do Art, can’t I?” Indeed, what difference does it make? And suddenly another smile, a lisp, the walls were beginning to crumble, breadcrumbs and coffee beans danced on the floor, another cockroach jumped with happiness, and the ants kept working, while somehow we’re under the floorboards – with a smile.

We got lost again… “and the documents?” we asked. “Ah, you can’t have the application out but you can have the list of documents”. The application, how could we ever think of it leaving the premises?!!! It would miss all the dross that had covered its meaning for over 70 years now… The documents, well, as usual, all that can discourage any hopeful pretender – all please! All your academic life on paper, and may the thousands of pages prevail! But we don’t mind – the tree is full of trees. In fact, thanks to the Lebanese university’s close collaboration with the ministry of the environment, all new building projects have been put on hold or annulled, to be replaced by reforesting projects – may God bless this holy land.

We took the lift to the cloud-floor, we jumped out and fell back laughing on our cloud: thank God for the few remaining wine estates in this land.

[hr]

Read also: http://www.redlipshighheels.com/thinking-of-joining-the-lebanese-universitys-teaching-force-think-again/

Like a Grain of Salt (انتم ملح الأرض‎)


 
In our colorful life of different shades of greens, reds and blues, we trace our individuality.
We create the cocoon in which we survive and in it, is born our world of imagination, vision and dreams.
Like a priceless treasure, we learn and grow to protect our inner richness and value.

We are the salt of the earth…
We bring meaning and flavor to the bland common life that surrounds us.
Like a grain of salt, we dissolve ourselves in the ocean of humanity satiating the hunger of our brothers and sisters.
Like a grain of salt, we seem to belong, but we are different, not from this world.
Like a grain of salt, when called upon by the scorching sun, we recover our shape and are offered at the table of the One who shakes the hearts with His love, and whose Spirit inhabits the dwellings of his children…
[hr]
Painting by Katia Aoun Hage (pastel and charcoal)

Thinking of joining the Lebanese University’s teaching force? Think again!!

This is what my colleague and I were told this morning, while trying to apply for teaching positions at the Lebanese University, proud of our respective 20+ pages CVs and countless publications. The secretary in charge of receiving the applications looked at us, laughing, cynically: “Why do you want to apply to this university? Professors are paid every two or three years, depending on the political situation, and do not dream of a full-time position. It is also a political matter – in other words: seems you do not have a wasta (plug), and in this institution you need one. Why did you come back to Lebanon? Why did you leave France and Canada – meaning: what are you doing here? Are you crazy?? Philosophy? We do not need philosophers! Nor experts in sciences of religions of course! And in fact, we do not need anyone! A call for application? Which one? Ah that one… Mmm… This is a list of papers you should submit, but I do not encourage you…”

Needless to say that we were shocked for quite a moment, and a glass of wine seemed the only remedy to this awkward encounter. Everybody knows the Lebanese University, which is the only public university in Lebanon, has problems at all levels: lack of modernization, need of restructuring and change in the faculty and administration’s qualifications, managing the institution is politicized and associated with personal and sectarian interests, etc. Still, one thing is to read about those problems in sporadic articles, and another thing is to face a harsh chaotic reality condensed in a limited time frame and space. The endless struggle of LU students and teachers incarnated in those tiny outdated office, cracked building and embittered employee with a significant axe to grind. The endless battles of individuals and civil society’s organizations for a better university, and country… Working hard, eager to take those to the level of their ambitions and aspirations, away from all sorts of factional, sectarian, partisan and personal interests whatsoever.

The Lebanese University was born in 1950, owing to the strike carried out by students of the poor classes who were unable to pay the private universities’ fees. And today? Professors demonstrating from time to time, defending their own rights as well as their students’; teachers being excluded if they happen to be independent Shiites, Sunnis, Christians and Druze, not affiliated to any party; quotas controlling the LU teachers’ appointments; a strong need for new and diversified specialties, hence additional teachers, and dedicated professors in light of the rising numbers of retiring persons – which is not the case of contract teachers; they simply have no time for elaborate scientific research as they need time to focus on education, either in private universities or schools, so as to secure a decent life.
Let me remind my fellow citizens and our so-called political leaders that the decadence of a nation is linked to poor standards of education, and the leadership problem is a product of falling standards and mediocrity. Failure to invest in education undermines the future of our children, exacerbating social inequality and economic crisis.

I became a university teacher because I enjoy helping young people learn. I saw teaching as a way to “make a difference”, especially in this war-torn country. But at this moment in history, teachers face opponents who are doing great harm, to children, schools, universities and our profession, harm that we cannot impede solely through our role in classrooms. Where are university teachers’ unions? Isn’t it time to think/rethink unions’ goals and organizational structures? Maybe as social movements, seeing its members’ well-being as inextricably connected to broad struggles for social, economic and political justice. Considering now how Honduran teachers led the movement to protect political freedom when the nation’s duly-elected president was ousted by the military…

The bottom line is simple yet important. We collectively need to make greater efforts to arm the next generation with the right mix of robustness, excellence, creativity and agility. If we want to get Lebanon back to work, “you don’t fire teachers or don’t care about your human resources, you invest in them”. It is time for our ‘leaders’ to show foresight and courage by recognizing that public (and private) higher education is simply too big — and far too important — to fail.

Derek Bok, former president of Harvard University, once issued this challenge: “If you think education is expensive, try ignorance.” Our nation simply cannot afford to give ignorance a try and see what happens. That’s a short-sighted choice based on a misguided, penny-wise-pound-foolish attitude. Our ability to survive, before even competing and winning in the regional economy, requires an emergency plan to rescue and revitalize our higher education system.

[hr]

Image source: harveysarles.com

أين الإبداع؟


لقد بدأت فترة الإمتحانات في المدارس والجامعات في لبنان  ومعها الخوف من السقوط والرغبة في النجاح. لا يتربى الطفل أو الطفلة على إتقان العمل الإبداعي، على إنتاج الفكر والعمل لأجل مصلحة الوطن، بل طمعاً في النجاح أو خوفاً من الفشل. يتربى الشاب أو الشابة على الترغيب في المكافأة والترهيب بالعقاب، والطمع في الجنة والخوف من نار الجحيم، لا على الثقة بالنفس وبالآخرين.

تؤدي هذه الثقافة إلى تشويه الإنسان إذ يصبح سلعة في ساحة منافسة غير صحية. قد اثبتت عدة دراسات علمية نفسية عن الإبداع أن التربية القائمة على الترغيب والتخويف لا تنتج شيئاً مفيداً، بل أفراداً ومجتمعات مريضة تعيش في حالة مونولوج لا حالة حوار بناء، في حالة المحكوم بالحاكم ولا تبادل من أجل صياغة الفكر وتطويره.

أصبح شعبنا آلة إستقبال في جميع المجالات التربوية والتعليمية والثقافية والإعلامية، وفي عصرنا الفائق السرعة المعلوماتية، آلة إستقبال معلومات مبعثرة دون الرغبة في تحليلها ودون إمكانية تحول “الصامت” إلى “ناطق” وهذا الناطق من “تابع” إلى مواطن مبدع ومنتج.

لا أميز هنا بين المرأة والرجل. الغيت في بلدنا ثقافة الإبداع لتحل محلها ثقافة العنف، اللامبالة، الماديات، التبعية، الطاعة، ثقافة “طعامنا في يد غيرنا” ومعونات وقروض وإنتظار ما يدفعه السياح الأجانب – أين السياح؟

جوهر المجتمع المتقدم هو الصدق وإستقلال الرأي وبناء الشخصية الفردية المساهمة في خلق مجتمع أفضل وأكثر عدلاً وحرية وإستقلالاً. جوهر المجتمع المتقدم هو تربية الأطفال والشباب ليصبحوا مواطنين لهم عقل مبدع، ليس مجرد أفراد بلا إرادة ولا كرامة، ليس مجرد أجساد تعرى أو تغطى، تصمت أو تهرب من التصدي والنقد البناء، تتوارث النفاق والقيم الإزدواجية في السلوك – أي الخضوع وإمتهان النفس مع الأقوى، والتسلط مع الأقل قوة.

“ما العمل؟ المسألة محبطة”… هذا ما أسمع من معظم تلاميذي في الجامعة. المسألة ليست الإكتئاب أو الإحباط. المسألة هي رفض الصمت، لأن الصمت إشتراك في الجريمة – أي ختان العقل، أبشع الجرائم الإنسانية. المسألة هي إحياء حركة فكرية جديدة في لبنان، بعيداً عن الملكيين والإطناب والنفخ في الأبواق والمزامير، بعيداً عن نخبة أنصاف الآلهة الذين لا يعتبرون سلوكهم نفاقاً ولهم تبريراتهم الفلسفية العميقة لموضوع النفاق – أي حماية الحكم ألقائم لأن “البديل غير موجود أو أسوأ”.

La guerre continue…

Cyclones de décadence,
les exterminations se succèdent,
les armes fusent de partout,
plus l’humanité se sophistique,
moins la folie s’estompe.
Les périodes de paix?
Des accidents de l’histoire,
des fleuves de sang versé,
la misère, l’hécatombe,
et l’indignation ne peut rien y faire.
La guerre continue…
Et pourtant,
l’hiver semble plier bagage…
Dès les premières lueurs de l’aube,
une chaleur envoûte les habitants de Beyrouth.
Beyrouth?
Entend-on…
Etonne et fascine…
Malgré les années de guerre,
elle se relève et s’affirme.
Les chantiers de reconstruction y sont nombreux.
Voitures et piétons,
festivals et expositions,
un florilège de senteurs,
de musique et de magie,
saisons lumineuses,
spectacles et fêtes grandioses,
promettent de se déployer en grande pompe.
L’ambiance semble émerveiller les uns,
elle fatigue les autres.
Ces autres qui se bousculent devant l’entrée d’un consulat étranger,
ces autres qui attendent des heures durant,
avant de faire partie des rares élus,
admis dans l’enceinte sacrée du mausolée,
un temple vendeur de rêves de liberté,
introuvable pilier,
sinon,
cher à payer…
Triste réalité,
cynique épreuve,
qui traîne et entraîne les Libanais,
zombies conduits par des dirigeants,
à un abattage intempestif,
lente et amère hémorragie,
gouffre de préjugés,
mémoires conflictuelles non assouvies…
Se taire et payer son tombeau,
telle est la règle d’or du cimetière…
Où est donc passée la ‘Suisse de l’Orient’?
Le temps de sa gloire semble inaccessible…
Et pourtant, le passé survit dans les esprits,
les histoires, les mémoires et les édifices.
Mais il resurgit,
en apportant avec lui des bouchons inextricables,
des situations en toile de fond assombrie,
un Liban plongé dans une létharige étouffante.
Les combats ont cessé à Beyrouth,
mais la guerre continue…
Dehors, c’est l’orage,
dedans, c’est la rage.
Sombres souvenirs,
qui rattrapent et enflamment.
Ma voix s’éteint,
mon coeur chavire.
Je me noie,
je m’enlise,
je me ressaisis et j’aspire…

How I Do Feminism

Dr. Pamela Chrabieh
Dr. Pamela Chrabieh
2013, Lebanon

I will not focus here on answering the question of ‘why’ doing feminism in a closed circle with tiny windows, but I will definitely talk about the ‘how’ – in fact, the ‘how’ is related to the ‘why’ -: while seeing and defining ‘change’ from different yet complementary perspectives – as a professor and academic researcher, but also as an activist,  artist, blogger, author, mother, citizen, … Change for a better society, for equality, for social justice, for conviviality and for peace, requires both tactical and intellectual skills, living in a war zone, telling one’s story, and defining schematics to be debated.

I do feminism in a ‘lieu’ where divergent renderings intersect, and beyond… A space of translation where I see, think/rethink and try to enact change.  When a feminist action is defined as a space, it could evolve as more than an intellectual endeavor or a practice. In this space, I can discuss and shape, define and do, on my own and-or with others. This space embodies positive outcomes and failures, possibilities and impossibilities. It requires that I perform feminism as a personal and public commitment, because different situations require alternative feminist actions. It requires that I do and redo, think and rethink, define and re-define, shape, move, as different dynamics happen. An open space to unaware action, unconscious patterns, grey zones, and intersections with a diversity of identities: ethnic, social, economic, political, philosophical, sexual preference, etc. Every feminist action is informed by this diversity and the knowledge(s) it produces.

How I do feminism is a constant fight on many levels (private and public, offline and online, urban and rural…) with one common point: deconstructing the illegitimacy of feminist discourses and praxis. In fact, women’s actions, bodies and voices are not legitimate in Lebanon and throughout the Middle Eastern region. If they were, I am certain there would have been more than 3% of women in the Parliament. All levels are violently policed to exclude its Others – women, religious/sectarian minorities, ethnic minorities, LGBT, … with few exceptions. Nancy Fraser called for “subaltern counterpublics” or “parallel discursive arenas” where members of subordinated social groups invent and circulate counter-discourses, which in turn permit them to formulate oppositional interpretations of their identities, interests and needs. Red Lips High Heels’ blog and Facebook Page – and many other online platforms – are examples of those subaltern counterpublics. Still, my feminism is not only articulated in parallel arenas but within the ‘traditional’ arenas too, between diverse arenas, and beyond!

One could argue that doing feminism within the Lebanese academic system is a kind of subaltern counterpublic in itself. Still, when it has to deal with the ‘norms’ of the system and survive in this environment, it opens a door to dialogue without becoming institutionalized. Doing feminism does not have to be ONLY in a counterspace, with a counterpublic. Contrary to what other Lebanese feminists think, I believe that doing feminism ONLY in parallel spaces can contribute to its disappearance.  As long as I am able to teach both openly and ‘under the radar’ (when necessary), and shift pedagogical practices, I will pursue my ‘doing feminism’ in my classrooms and with my colleagues, while trying to recognize other people’s subjectivity and to involve my audience, no matter how hostile it may be.

[hr]

Work Cited: Fraser, Nancy. “Rethinking the Public Sphere: A Contribution to the Critique of Actually Existing Democracy.” In Craig Calhoun, ed. Habermas and the Public Sphere. Cambridge, MA: MIT Press, 1992. 109-142.

 

Soulevons-nous ! Revendiquons nos droits !

droits des femmesPermettez-moi de partager ces quelques histoires vraies, tirées du vécu de bien de libanaises, et certainement que d’autres femmes à travers le monde arabe peuvent s’y retrouver…

Que dire lorsqu’une mère de six enfants est répudiée par son mari après 30 ans de mariage, sans pouvoir emporter quoique ce soit, car celui-ci avait envie d’une épouse plus jeune ? Et aucune loi pour garantir ses droits !

Que dire lorsqu’une jeune de 21 ans qui s’amourache d’un jeune homme d’une religion différente et qui se fait tuer par son frère car elle aurait souillé l’honneur familial ?

Que dire lorsqu’une employée se fait harasser sexuellement par son employeur, et suite à son refus, est licenciée et sa réputation démolie ?

Que dire lorsqu’une employée découvre que son employeur marié a pour maîtresse une secrétaire de bureau, et est licenciée juste pour connaître la vérité ?

Que dire lorsqu’un homme brûle son épouse lorsque celle-ci, suite à des années ayant subi la violence conjugale, demande le divorce ?

Que dire lorsqu’une femme est ‘obligée’ de se faire recoudre l’hymen avant son mariage pour ne pas être assassinée par sa famille ou sa belle-famille ?

Que dire lorsqu’une femme est violée, qu’elle tombe enceinte, et qu’elle se fait dire qu’elle devrait garder l’enfant vu que l’avortement est contre-nature ou contre-Dieu, et que le violeur peut laver sa faute en l’épousant ?

Que dire lorsque la femme subit continuellement la pression et l’intrusion de sa belle-mère, et que son époux n’a pas coupé le cordon ombilical ?

Que dire lorsqu’une femme se fait dire qu’elle devrait ‘arrêter de travailler’ et ne s’occuper que de ‘procréer’ car sa fonction d’être humain se réduit à une ‘machine à bébés’ pour renflouer les rangs de la confession, de la famille ou du clan ?

Que dire lorsqu’une femme ne peut donner la citoyenneté à son époux et ses enfants dans un pays où soi-disant ‘tous les citoyens sont égaux devant la loi’ et que plus de la moitié des électeurs sont des femmes ?

Que dire lorsqu’une femme est quotidiennement harassée pour suivre une diète et se refaire plusieurs parties de son visage et son corps vu qu’elle ne suit pas les ‘standards de beauté’ établis par la société ?

Que dire lorsqu’une femme se fait dire qu’elle n’est pas aussi compétente qu’un homme parce qu’elle est femme, et quelle que soit la spécialisation?

Que dire lorsqu’une femme a un salaire inférieur de 20 à 50% qu’un homme avec les mêmes compétences ?

Que dire lorsqu’on demande à une femme si elle compte avoir des enfants avant d’être embauchée, ou lorsqu’on refuse de l’embaucher si elle est enceinte ?

Que dire lorsqu’une femme se fait dire qu’elle a obtenu un bon poste sûrement pas pour son intelligence et ses qualités mais pour son physique et ses ‘services’ sexuels ?

Que dire lorsqu’une femme se fait tutoyer et traiter d’une manière condescendante et infantilisante, contrairement à ses collègues hommes ?

Que dire lorsqu’une femme devrait travailler 100 fois plus qu’un homme pour se prouver dans le milieu tant public que privé, et encore…?

Que dire lorsqu’une femme se fait dire qu’elle ne peut être politicienne vu qu’en tant que femme, elle n’aurait pas le sens du leadership ni la capacité physique d’endurer ce que l’homme endure?

La liste est longue…
Trop longue même…
Dénoncer n’est qu’une première étape…
Sublimer la souffrance par la parole est un début…

Soulevons-nous ! Nos droits, nul ne nous les donnera ! Elevons nos voix ! Nous devons les revendiquer !

[hr]

Image source: www.journaldutchad.com

"Against the Current" Jihadist!

I am both Lebanese and Canadian. I was born in Lebanon, survived the 80s physical war, left for Montreal in 1999 to pursue my studies, was stuck in Lebanon during the Summer 2006 war, and decided, along with my husband, to leave Canada and live again in Lebanon.

I am what many define as ‘against the current’ (aaks al sayr).

I chose to study the religious phenomenon and become a Doctor in Sciences of Religions when my family was encouraging me to be a Medical Doctor. I chose to teach in highly patriarchal environments where secular women are almost nonexistent, when I had the opportunity to follow a successful career path in a ‘healthier’ context. I chose to do politics the ‘bottom-up’ way, when I was asked to be part of a ‘top-down’ corrupt system. I developed a mediatory social-political theory of diversity management in Lebanon when the only ‘allowed’ alternatives were Sectarianism, Mono-Religious State, or Secular. I chose to fight for women’s rights when many activists told me other fights should be my priority – women’s rights are ‘secondary’ or just ‘futile bourgeois claims’ in a world of poverty, social injustices and political turmoil. I fought – and am still fighting – for Interfaith dialogue and Human Dialogue where fanatic and exclusivist approaches became ‘norms’. I fight for political gender equality when most Lebanese feminists are fighting for the minimum quota in the Parliament. I fight for a holistic approach in Life management in a country labeled the ‘Mecca of Plastic Surgery’ and the ‘Empire of Physical Beauty Standards’.

Against the current…

Not a heroic journey…

Just a different mindset and praxis using specific mind/ body motions and energy in the environment to direct my journey upstream without much “muscular” investment. Like a fish employing a swimming motion to harness the energy of eddies in flowing water.

I am not saying that it is not exhausting to be against the current, but it is manageable and positively challenging.

What about the ‘Jihad’?

Jihad is the Arabic for what can be variously translated as “struggle” or “effort,” or “to strive,” “to exert,” “to fight,” depending on the context. In the West, the word is generally understood to mean “holy war,” and the terms are given, inaccurately, exclusively military connotations. The Quran does call for “jihad” as a military struggle on behalf of Islam. But the Quran also refers to jihad as an internal, individual, spiritual struggle toward self-improvement, moral cleansing and intellectual effort. It is said that Prophet Muhammad considered the armed-struggle version of holy war “the little jihad,” but considered the spiritual, individual version of holy war–the war within oneself–as “the great jihad.”

I am referring here to the basic Arabic meaning without a religious connotation: an effort. Not a self-defensive effort i.e. to combat the enemies with a sword; but a mental/spiritual effort to be fulfilled using the mind, the heart, the tongue (speech) and the hand (writing). In other words, a deconstructive-constructive struggle, an inquiry into the conditions of possibilities and impossibilities; uncovering what Jacques Derrida calls a type of ‘structural unconscious’ or blind spots for the purposes of intervening against injustice; examining what Mohammed Arkoun calls the ‘unthought’ and the ‘unthinkable’ dimensions while criticizing what stands within the enclosure or the ‘thinkable’.

In a time where war is the predominant culture, where the survival of the fittest is the rule, and physical/material strength the source of authority, an ‘against the current jihadist’ uses the pacifist thinking-rethinking process, following the notion of a personal spiritual quest which creates a new kind of human being as described by Socrates, Jesus and Buddha: an autonomous individual responsible for his/her choices and actions, and not beholden to any group.

ترتفع صيحتي

ترتفع صيحتي كلما أسمع شخصاً يقول لي: المرأة ملك الرجل! المرأة زينة الرجل! المرأة جزمة تغيرها كلما تشاء! خلق الله المرأة لتخدم الرجل.

ترتفع صيحتي بشدة عندما أسمع إمرأة تنادي بأهمية وأحقية الرجل في إمتلاك المرأة بينما المرأة لا تملك زوجها لأن السيد يملك العبد لكن العبد لا يملك سيده.

ترتفع صيحتي في مواجهة فكر وممارسة العبودية، واحتباس المرأة وكل إنسان يصبح سلعة للآخر، شيئاً…

ترتفع صيحتي عندما ترن في أذني كلمة “الرق” المؤلمة – من هنا سميت المرأة “رقيقة” – وخاصةً في مجتمعات “مثقفة” و”متقدمة” وتتمتع بالرفاهية، ولكن يحق لها أن تملك جسد أحد !

ترتفع صيحتي في بلادي في مواجهة هذا الواقع : “المرأة لم تعد إنسانا بعد في نظر أغلب الرجال وبل في نظر بعد النساء أيضاً”.

ترتفع صيحتي في واقع مرير، الذي فيه لا يحق للمرأة الطلاق أو الخلع أو السفر دون موافقة زوجها، لأن عقد الزواج يفرض على الزوجة طاعة زوجها، فهو ينفق عليها وله ألحق مقابل الإنفاق في احتباسها.

الإحتباس مقابل الإنفاق!! الطاعة مقابل الإنفاق!! وهل هناك شيء ضد الأخلاق والإنسانية أكثر من إكراه النساء، إكراه كل إنسان ولمجرد الإنفاق عليه؟

 ترتفع صيحتي وأطالب بحرية المرأة حيث تمتلك جسدها وعقلها كاملاً ولا وصاية لأحد عليها.

 ترتفع صيحتي في مواجهة “المعلم” الذي يخاف على ضياع آخر القلاع في املاكه الخاصة.

 أساس الأخلاق هو الحرية، حرية الفكر والممارسة والإختيار – أي المسؤولية، لا الخضوع للقهر…

[hr]

Image source: www.collective-evolution.com